Qu’elle le veuille ou non, l’école va être ubérisée. Disons même que le processus est déjà bien engagé. Pourquoi ?

J’ai récemment pris conscience qu’il n’existe en fait AUCUNE instance représentative des élèves à l’école ! A l’exception, peut-être des délégués de classe. Mouais !

J’ai été délégué de classe une fois au lycée. Pour ma défense, je tiens à préciser que je ne m’étais pas présenté à l’élection. Eh bien, mon rôle se bornait à – tenez-vous bien – plaider pour mes camarades lors des conseils de classe. C’est vous dire l’impression de puissance qui se dégageait de ma personne lorsque j’arpentais la cours de récré.

En clair, ni les professeurs, ni le personnel de l’établissement, ni les inspecteurs d’académie n’ont le moindre intérêt pour le ressenti de l’élève ou de l’étudiant. Pire que ça : dans la notion même de « service public », le premier mot est complètement oublié. Amnésique, l’Education nationale ne s’est certainement jamais pensée comme un service à destination de ceux qui assistent au cours !


L’expérience étudiant, pivot de la transformation de l’école


L’expérience étudiant constitue un des prochains axes de perturbations de la transformation digitale. Je fais le pari qu’il va changer votre vie à vous, même si vous ne poursuivez pas d’étude.

 

Rappelons au préalable que le concept d’expérience client ou expérience utilisateur est au cœur du maelstrom provoqué par la révolution numérique. Bien sûr, on se souciait avant de ce que le client ressentait au contact d’un produit. Mais internet et les nouvelles technologies ont donné une bonne gifle aux points de vente physique (le retail !) en allant bien au-delà des rêves des consommateurs. Et si je commandais le dernier Harry Potter en buvant un chocolat chaud sur mon canapé ? Livré en 24h ! Il fait -20° dehors et il neige.

 

Dans son sillage, on a vu apparaître l’expérience employée. « Dommage collatéral » de l’expérience client, les entreprises ont commencé à se préoccuper du ressenti du collaborateur. Avec cet autre séisme dans la culture d’entreprise (en particulier pour la France), la question du bien-être au travail a donc fait son apparition. Dieu soit loué.

 

Et voilà à présent un nouveau tsunami qui s’approche des côtes, un concept inédit qui promet de secouer quelques vieux édifices. Puisque nous n’allons pas y échapper, autant s’y préparer.

 


Définition de l’expérience étudiant


L’expérience étudiant désigne la perception, le ressenti d’un apprenant concernant une formation donnée, en fonction de qualités comme l’ergonomie, l’accessibilité et le confort. Dans ce concept, on s’intéresse au vécu de l’étudiant au contact d’un apprentissage.

 

Exemple : aujourd’hui, Youtube offre une expérience étudiant souvent beaucoup plus attrayante que les cours en classe grâce à des tutoriels conçus par des experts du domaine. La plateforme vidéo constitue aujourd’hui une formidable bibliothèque où le formateur (ou professeur), obéit littéralement au doigt et à l’œil de l’étudiant.

 

 

Qui est concerné ? Tout le monde. Même si vous n’êtes pas étudiant, il y a de fortes chances que vous ayez à suivre une formation à un moment ou à un autre. Ou bien vous aurez envie de vous former sur un sujet. Quand nous parlons d’expérience étudiant, nous pourrions aussi bien dire « expérience apprenant ».

 

Et celle-ci est le pendant du digital learning, cette évolution technologique majeure de la pédagogie, à savoir l’apparition du numérique sur l’ensemble de la chaîne de la formation professionnelle, de la création à la diffusion du savoir. Le digital learning comprend la production de modules pédagogiques, leur mise en place sur des plateformes sécurisées, la sauvegarde des données, l’interactivité des formations, la mise en place de forums ou de blog, la traçabilité des données, etc.

 

Le numérique est désormais omniprésent et dépasse de loin le cadre de la formation e-learning. Il a fait son entrée dans les salles de classe, avec la multiplication (et la démocratisation) des ordinateurs ou des tablettes. A quand le prof en hologramme ?

 


L’ubérisation de l’école


C’est l’histoire d’Uber et les taxis qui se répètent. Depuis les lois Jules Ferry (1881-1882), qui rendent l’instruction gratuite, laïque et obligatoire, l’école de la République bénéficie d’un quasi-monopole. C’est à peine si le retour en grâce des écoles privées (essentiellement catholiques) pendant l’occupation l’a remis en cause. Dans les grandes lignes, l’école n’a pas changé depuis près de 150 ans. Il faut dire que le monopole n’est pas vraiment une position propice à la remise en question.

 

Sans adversaire, l’école s’est donc reposée sur des acquis et est devenu obsolète, du simple fait qu’elle n’évoluait pas, tandis que le monde autour lui continuait d’avancer. Facteur aggravant – et très surprenant -, personne n’a jamais demandé de compte à l’école, ni la classe politique, ni le monde de l’entreprise, ni même les parents !? L’Education nationale vous donnait des notes ; mais vous, né de la poussière et destiné à redevenir poussière, vous ne pouviez pas noter l’Education nationale.

 

Et ça ne choque personne. Vous apprenez par cœur les dates de toutes les batailles que la France a eues avec ses voisins, depuis la préhistoire. Et à quoi ça vous sert lorsque vous cherchez un emploi ? Est-ce que l’Education nationale pense que les entretiens d’embauche ressemblent à des questions du Trivial Poursuite ?

 

Si les gens savaient que l’école n’est pas obligatoire (c’est “l’instruction” qui est obligatoire et elle peut très bien se faire à la maison), je me demande si les établissements ne seraient pas désertés. Sauf que l’école sert aussi de garderie pour les enfants, off course !

 


Prendre les devants et s’ubériser de l’intérieur avant d’être disrupté


Voici deux exemples qui illustrent le principe d’une expérience étudiant pensée et mise en pratique.

 

La première est une expérimentation d’une école des Etats-unis, Katy independent school district, qui utilise le mobile learning.

 

 

La deuxième est une école de commerce qui s’appuie, elle, sur la réalité virtuelle.

 

 

Pour plus de détail sur cette dernière démarche, je vous invite à lire l’article d’Alain Goudey,la réalité virtuelle, un atout pour l’éducation.

 

Ces deux initiatives montrent comment l’Education nationale pourrait opérer sa révolution numérique et revenir d’un coup en phase avec le monde tel qu’il est.

 


Les paramètres de l’expérience étudiant


Un enseignement prenant en compte l’expérience étudiant intègrerait les paramètres suivants :

 

1. Une formation adaptée à l’apprenant

Elle est personnalisée et s’enrichit des données résultants de l’interaction avec l’étudiant. Elle exploite donc au mieux la data. Exit le cours magistral en tant que tel !

 

2. Qui donne le choix

Avoir le choix de la matière, avoir le choix du média : c’est l’étudiant qui décide de ce qu’il veut étudier. L’étudiant a accès à une plateforme (le fameux learning management system ou LMS) où le savoir est mis à sa portée, comme une bibliothèque de cours.

 

3. N’importe où, n’importe quand et n’importe comment

Avec le smartphone et les tablettes, la connaissance est accessible partout, y compris dans les moments perdus comme les transports ou dans une file d’attente.La classe inversée, qui réinvente l’apprentissage, se base sur le fait de mettre à disposition des vidéos éducatives pour l’élève quand il est à la maison. Les exercices (les devoirs) se font en classe.

 

4. Collaboratif

Une des principales révolutions accomplie par cette pédagogie centrée sur l’expérience étudiant est l’abandon de la compétition au profit de l’enseignement collaboratif. Franchement, on se fiche complètement de savoir qui est meilleur en quoi et de classer les gens avec un système de notes.

 

Si l’on se sert d’examen, c’est simplement pour mesurer le degré d’assimilation d’un savoir et repérer les éventuelles lacunes. Cela permet de localiser les passages que l’étudiant doit revoir pour maîtriser complètement un module pédagogique.

 

En dehors de ça, avec internet, nous sommes résolument entrés dans l’ère du partage des connaissances. Contribuer, échanger, collaborer, c’est l’interaction qui prend le pas sur la compétition. Par ailleurs, préparer un étudiant au monde du travail, c’est lui apprendre à évoluer au sein d’une équipe où chacun apporte sa compétence.

Le but de l’instruction, c’est d’acquérir des aptitudes, pas d’avoir de bonnes notes !

 

5. Applicable

Pourquoi est-ce que les entreprises lorsqu’elles recrutent demandent des gens qui ont 2, 3 ou 5 ans d’expériences ? Réponse : parce qu’elles savent pertinemment que les études que les gens font NE LES PREPARENT PAS à occuper une fonction dans une organisation. C’est fou !

 

Une formation bien faite devrait être dirigée vers le but d’occuper une fonction ou du moins à pouvoir effectuer des actions pratiques dans un domaine donné.

 

L’expérience étudiant intègre la mise en application constante des connaissances.

 


Epilogue


Il y a une conception complètement idiote de l’enfant dans la société comme un être en devenir ou pire, un espèce de petit animal en dressage. Comme Socrate face au monde, j’ai pris conscience face à mon fils nouvellement né que je ne savais rien. Je ne connaissais rien du fait d’être père. La chose à laquelle je me suis raccroché était d’être à l’écoute et d’essayer de comprendre.

 

Nous les adultes, nous avons tellement de choses à apprendre des enfants. Cela commence par le fait d’écouter et de ne pas considérer que nous savons mieux. La vie est un travail d’équipe, un effort collaboratif pour faire avancer notre civilisation. L’expérience étudiant se situe dans l’échange où le professeur et l’ensemble du personnel de l’éducation nationale travaillent en équipe avec les apprenants pour trouver des meilleurs manières d’instruire.


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